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Traitement chirurgical des fractures de l’acétabulum chez la personne âgée: prothèse ou ostéosynthèse?
Leading Opinions
Autor:
PD Dr méd. Christian Kammerlander
Clinique de chirurgie générale, traumatologique et réparatrice, Clinique de l’Université de Munich<br> Clinique universitaire de chirurgie traumatologique, Innsbruck<br> E-mail: Christian.Kammerlander@med.uni-muenchen.de
Autor:
PD Dr méd. Dietmar Krappinger
Clinique universitaire de chirurgie traumatologique, Innsbruck
Autor:
Deborah Schray
Clinique de chirurgie générale, traumatologique et réparatrice, Clinique de l’Université de Munich
30
Min. Lesezeit
16.05.2018
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<p class="article-intro">Dès à présent, nous enregistrons une augmentation de l’âge moyen des patients souffrant de fractures de l’acétabulum. Une forte proportion de ces patients sont des patients gériatriques. Les décisions de traitement chez les patients âgés en traumatologie exigent une évaluation clinique particulièrement détaillée et devraient permettre une mobilisation rapide afin d’éviter les complications postopératoires telles que la pneumonie, les infections urinaires et le décubitus. La littérature actuelle ne fournit pas de recommandations de traitement claires pour les patients gériatriques souffrant de fractures de l’acétabulum. Le présent article de synthèse a pour but de fournir une aide à la décision en vue de la pose d’une indication pour le traitement chirurgical.</p>
<p class="article-content"><div id="keypoints"> <h2>Keypoints</h2> <ul> <li>Les objectifs de traitement des patients âgés sont principalement la restauration rapide de la fonction articulaire grâce à un traitement chirurgical en un seul temps stable («single shot surgery») et à une mobilisation à pleine charge précoce. Une mobilisation précoce réduit le risque de complications postopératoires ainsi que de mortalité.</li> <li>En présence d’une coxarthrose symptomatique, de fractures comminutives ou notamment en présence d’un «gull sign», l’endoprothèse totale primaire doit être préférée à l’ostéosynthèse.</li> </ul> </div> <p>Le traitement chirurgical des fractures de l’acétabulum gériatriques pose des défis particuliers aux chirurgiens. Bien que l’incidence de ces fractures se soit constamment accrue au cours des dernières décennies, les fractures de l’acétabulum gériatriques sont encore assez rares et, par conséquent, l’expérience de chaque chirurgien est généralement limitée. La procédure chirurgicale dépend de l’expérience et des préférences de chaque chirurgien. On manque avant tout d’essais contrôlés randomisés.</p> <h2>Épidémiologie et étiologie</h2> <p>Au cours des deux dernières décennies, on a constaté une augmentation de l’incidence des fractures de l’acétabulum gériatriques. Cela s’explique à la fois par l’allongement de l’espérance de vie et par le niveau d’activité plus élevé des personnes âgées. Le pic d’âge se situait déjà entre 60 et 70 ans en 2005/06 et plusieurs auteurs ont constaté une augmentation de 67 % des fractures de l’acétabulum gériatriques entre 1998 et 2010. Il est très probable que cette tendance se poursuivra au cours des prochaines années. Contrairement au jeune patient, qui souffre habituellement d’une fracture de l’acétabulum à la suite d’un traumatisme à haute énergie, les patients âgés, en majorité de sexe féminin, subissent typiquement cette fracture suite à une chute à partir de la position debout. Il s’agit généralement de lésions isolées de l’acétabulum, qui s’accompagnent souvent d’une ostéoporose prononcée. En raison de l’antétorsion du col du fémur, la force est généralement transmise par le grand trochanter dans la direction de la colonne antérieure et de la surface quadrilatérale.</p> <h2>Diagnostic</h2> <p><strong>Examen clinique</strong><br /> Chez les patients gériatriques, les décisions de traitement dépendent pour une très large part de facteurs liés aux patients. Au-delà des examens de routine, les facteurs suivants doivent impérativement être enregistrés en cas de fractures de l’acétabulum:</p> <ul> <li>État social avant la lésion</li> <li>Exigences fonctionnelles</li> <li>Indépendance dans les activités de la vie quotidienne (AVQ)</li> <li>Comorbidités médicales</li> <li>État cognitif</li> <li>Qualité des os</li> <li>Degré de coxarthrose de l’articulation concernée</li> <li>Fractures supplémentaires eu égard à leur influence sur la mobilisation postopératoire</li> </ul> <p><strong>Imagerie</strong><br /> Les clichés standard radiologiques sont la vue d’ensemble du bassin, le cliché de l’obturateur et de l’aile. Lors de la radiologie, il convient d’apporter une attention particulière à l’impact de l’os sous-chondral dans la zone du dôme acétabulaire supéro-médial. Le «gull sign» (signe de la mouette) est associé à un mauvais pronostic dans le traitement conservateur ou l’ostéosynthèse (Fig. 1).<br /> La tomodensitométrie est considérée comme le traitement standard. La reconstruction multiplanaire est importante pour évaluer l’évolution de la fracture et comprendre le mécanisme du traumatisme. Il est possible d’évaluer la mesure des zones de débris et l’impact des zones marginales et des zones de charge de l’acétabulum ainsi que de la tête du fémur. De même, une subluxation de faible degré par médialisation de la tête du fémur est également clairement identifiable. Une reconstruction 3D supplémentaire permet d’avoir une meilleure compréhension de la fracture et de la position des fragments de la fracture les uns par rapport aux autres et peut être utile au cours de la planification de l’approche chirurgicale. La soustraction de la tête du fémur permet de visualiser une configuration complexe de la fracture de l’acétabulum selon toutes les perspectives.</p> <h2>Classification</h2> <p>La classification selon Letournel et Judet est établie et représente une classification anatomique et radiologique des fractures de l’acétabulum. On distingue les types de base et les lésions combinées. Les 5 types de base décrivent les fractures de la colonne arrière ou avant, de la paroi arrière et avant ainsi que les fractures transversales simples. Les 5 blessures combinées comprennent les fractures en forme de T, les fractures de la colonne postérieure et du bord postérieur de l’acétabulum, les fractures transversales avec lésion du bord postérieur de l’acétabulum, les fractures de la colonne antérieure avec fracture hémitransversale postérieure ainsi que les fractures des deux colonnes.</p> <p><strong>La fracture de l’acétabulum gériatrique</strong><br /> L’incidence des fractures de la colonne antérieure et de la paroi ainsi que la combinaison d’une fracture de la colonne antérieure et d’une fracture hémitransversale postérieure sont significativement plus élevées chez les patients âgés que chez les patients plus jeunes. La raison consiste dans le mécanisme d’accident différent, principalement avec la hanche tendue au moment du traumatisme chez les patients gériatriques. De plus, ces patients présentent plus fréquemment des zones de débris, un impact du dôme supéro-médial («gull sign») ainsi qu’un impact de la paroi postérieure et de la tête du fémur, le tout associé à un mauvais pronostic suite à un traitement conservateur ou des mesures ostéosynthétiques.<br /> Une fracture de l’acétabulum gériatrique typique est la fracture de la colonne antérieure avec fracture hémitransversale postérieure. Dans ce cas, la colonne avant est souvent fracturée en fragments multiples, tandis que la fracture transversale postérieure est simple et souvent non luxée. La surface quadrilatérale forme une continuité osseuse avec la colonne postérieure. En raison de la saillie médiane de la tête fémorale, la colonne postérieure fait généralement une rotation vers l’intérieur (blessure par porte ouverte, Fig. 2).</p> <h2>Prise de décisions</h2> <p><strong>Principes de traumatologie gériatrique</strong><br /> L’objectif principal du traitement est le rétablissement rapide de la fonction d’articulation de la hanche grâce à une intervention chirurgicale en un seul temps stable en charge («single shot surgery») avec mobilisation précoce. Chez les patients gériatriques, cet aspect est plus important que le maintien de l’articulation de la hanche. En outre, il convient d’éviter les longues périodes d’inactivité et les opérations de révision.<br /> Outre le type de fracture, les facteurs spécifiques au patient mentionnés ci-dessus sont particulièrement importants pour le traitement. La cogestion orthogériatrique est obligatoire.<br /> L’objectif doit être une intervention stable en charge. Une étude récente sur des patients souffrant de fractures de la hanche montre que les patients gériatriques ne peuvent pas effectuer de charge postopératoire partielle. Afin de garantir une mobilisation précoce, le traitement chirurgical doit donc permettre une charge postopératoire complète.<br /> Le délai entre le traumatisme et l’intervention chirurgicale doit être le plus court possible. Cependant, le traitement chirurgical des fractures de l’acétabulum gériatriques nécessite de l’expérience. Un retard dans le traitement chirurgical peut donc être justifié si aucun chirurgien expérimenté n’est disponible. Un bloc 3-en-1 peut, dans ce cas, être une bonne méthode pour améliorer la situation en termes de douleur jusqu’au traitement chirurgical.</p> <p><strong>Traitement conservatoire contre chirurgical</strong><br /> Dans le traitement des fractures de l’acétabulum gériatriques, la stabilité articulaire est primordiale. L’instabilité s’accompagne souvent de douleurs et de l’incapacité de marcher. Dans des situations manquant de clarté, p. ex. en cas de fractures non déplacées, le patient doit d’abord être mobilisé, grâce à l’appui d’une analgésie appropriée. Une mobilisation décevante avec des douleurs intenses est plus susceptible de rendre une stabilisation chirurgicale indiquée. Dans certains cas, cela peut également se faire par le biais d’un vissage peu invasif.<br /> Les colonnes acétabulaires sont particulièrement pertinentes pour la stabilité de la fracture. Bien que les parties luxées de l’articulation doivent être replacées et stabilisées chirurgicalement chez les jeunes patients, ce n’est éventuellement pas le cas pour les patients gériatriques. Un déplacement de quelques millimètres peut être toléré si la tête du fémur reste centrée dans l’acétabulum pendant la charge. Afin de détecter à un stade précoce une luxation croissante sous traitement conservateur, des examens de suivi radiologique réguliers sont absolument nécessaires. Cependant, une luxation de quelques millimètres seulement dans la zone des colonnes est pertinente et entraîne une plus grande instabilité. Ces fractures nécessitent généralement un traitement chirurgical.<br /> Les fractures de la colonne non luxées ainsi que les fractures transversales non luxées peuvent être traitées de façon conservatoire. Dans le cas de fractures avec subluxation ou luxation de l’articulation de la hanche, le traitement chirurgical est généralement indiqué chez les patients dont l’état général est médiocre. Le traitement conservateur des fractures instables par alitement prolongé ou traitement d’extension entraîne des résultats fonctionnels médiocres et des complications dues à l’immobilisation et devrait être évité dans le traitement des fractures de l’acétabulum gériatriques.</p> <p><strong>Traitement chirurgical</strong><br /> Le traitement chirurgical doit être pratiqué avec le moins de retard possible, par «single shot surgery», par un chirurgien expérimenté et doit créer une situation stable en charge.</p> <p><em>Ostéosynthèse</em><br /> En ce qui concerne les techniques de reposition et de fixation, l’ostéosynthèse en cas de fractures de l’acétabulum gériatriques ne se distingue pas significativement des soins apportés aux patients plus jeunes. Les accès combinés et de grande surface doivent être évités chez les patients gériatriques.<br /> En raison de l’incidence plus élevée de fractures de la colonne antérieure et de la protubérance médiane de la tête du fémur, on opte fréquemment, chez les patients gériatriques, pour des accès antérieurs. L’accès Stoppa modifié en tant qu’approche intrapelvienne permet un repositionnement direct et une fixation de la surface quadrilatérale, ce qui est crucial pour la restauration de la fonction de soutien médial de l’acétabulum. Pour stabiliser les fractures de la colonne élevées et les fractures de la crête iliaque, l’accès Stoppa peut être complété latéralement par une fenêtre de l’accès ilio-inguinal (fenêtre d’Olerud). Les plaques conventionnelles de reconstruction pelvienne ainsi que les plaques à angle stable et préformées anatomiquement conviennent à la stabilisation, ces dernières ayant une stabilité primaire plus élevée (Fig. 3).</p> <p><em>Endoprothèse</em><br /> L’implantation primaire d’une endoprothèse totale devrait être envisagée dans les cas suivants:</p> <ul> <li>Patients fragiles à mobilité réduite</li> <li>Fractures comminutives</li> <li>Impressions dans le domaine de la cupule acétabulaire de la hanche supéro-médiale («gull sign»)</li> <li>Ostéoporose sévère</li> <li>Coxarthrose préexistante</li> <li>Fractures qui exigeraient une opération complexe ou des approches combinées</li> <li>Fractures de l’acétabulum après hémiprothèse</li> <li>Fractures de l’acétabulum périprothétiques</li> </ul> <p>Le plus grand défi de l’endoprothèse primaire de la hanche est la fixation de l’acétabulum dans la région de l’acétabulum fracturé. C’est pourquoi on utilise souvent des cupules de reprise et des anneaux de soutien acétabulaires. Les développements récents consistent dans des anneaux de renforcement avec des vis de verrouillage pour la fixation angulaire stable de l’anneau dans l’os supraacétabulaire (Fig. 4). L’avantage est qu’aucune ostéosynthèse supplémentaire n’est nécessaire pour un ancrage stable de ces implants. Les premières évaluations d’une étude de cas en cours auprès de 30 patients ont mis en évidence des résultats prometteurs sans complications liées aux implants.</p> <p>La continuité osseuse entre l’os supraacétabulaire et l’articulation sacro-iliaque est nécessaire pour implanter ces anneaux de renforcement sans ostéosynthèse supplémentaire des colonnes acétabulaires. Dans ces situations, les fractures des deux colonnes représentent donc une contreindication à l’endoprothèse de la hanche sans ostéosynthèse supplémentaire.<br /> Ces composants de la cupule augmenteront probablement l’utilisation de l’endoprothèse comme thérapie primaire. Les études actuelles sur l’endoprothèse primaire de la hanche dans les fractures de l’acétabulum chez la personne âgée n’ont été réalisées jusqu’à présent qu’auprès d’un petit nombre de patients. Il n’y a pas d’études prospectives randomisées et le niveau de preuve est donc faible.</p> <p><em>Ostéosynthèse contre endoprothèse</em><br /> Pour faciliter la prise de décision, Capone a publié en avril 2017 une revue systématique consacrée au traitement des fractures de l’acétabulum de la personne âgée. Les résultats de 15 études (13 rétrospectives, 2 prospectives) y ont été évalués. Toutes les études incluses sont des séries de cas sans groupe témoin. L’âge moyen des patients était de 71,6 ans. Dans 7 études, le traitement a été réalisé par ostéosynthèse, dans 5 études, les patients ont reçu une combinaison d’ostéosynthèse et d’endoprothèse totale et dans 3 études, seule l’implantation de l’endoprothèse a été examinée.<br /> Il n’y avait pas de différence significative entre les groupes dans le score de Harris. Le degré de repositionnement était décisif pour la réussite de l’ostéosynthèse. Pour un repositionnement anatomique, l’implantation secondaire d’une endoprothèse totale a été réalisée dans 11,6 % des cas de coxarthrose symptomatique. Lorsque le résultat de la réduction était moins bon, le taux de réopération est passé à 22,3 % . Un taux de révision relativement faible de 4,9 % a été observé pour l’implantation d’une endoprothèse totale primaire. Les luxations et relâchements étaient les principales causes de révision. Les taux de complications périopératoires étaient comparables, à 32 % et 30 % , respectivement. Dans l’ensemble, le groupe d’implantation de l’endoprothèse primaire a présenté des durées d’opération plus courtes et une mortalité plus faible. Cependant, les limites d’une revue systématique doivent bien entendu être prises en compte lors de l’examen des résultats.</p> <h2>Bilan</h2> <p>Les patients gériatriques présentant une fracture luxée de l’acétabulum doivent être traités sans perte de temps par une intervention chirurgicale unique. Au niveau postopératoire, une charge complète doit être autorisée afin de permettre une mobilisation rapide, étant donné que les patients de ce groupe d’âge sont souvent incapables de réaliser une charge partielle. Les objectifs sont une période d’alitement courte et une faible mortalité et morbidité postopératoire.<br /> On trouve dans la littérature des indications selon lesquelles l’implantation primaire d’une endoprothèse totale, éventuellement en combinaison avec un ancrage supraacétabulaire de la cupule avec des vis et/ou une plaque supplémentaire au niveau d’une colonne acétabulaire, est la thérapie de premier choix pour le traitement des fractures acétabulaires gériatriques. En cas de coxarthrose symptomatique préexistantes, de zones de débris ou d’impact sur le dôme supéro-médial («gull sign»), l’endoprothèse totale doit toujours être préférée à l’ostéosynthèse.<br /> Les résultats actuels sont principalement basés sur l’expérience de chirurgiens individuels et sur des études de cas auprès d’un petit nombre de patients. Des études prospectives ou randomisées devraient être menées afin d’établir une voie de traitement claire avec un niveau de preuve plus élevé.</p> <p><img src="/custom/img/files/files_datafiles_data_Zeitungen_2018_Leading Opinions_Ortho_1802_Weblinks_lo_ortho_1802_s21_fig1-4.jpg" alt="" width="1417" height="1818" /></p></p>
<p class="article-footer">
<a class="literatur" data-toggle="collapse" href="#collapseLiteratur" aria-expanded="false" aria-controls="collapseLiteratur" >Literatur</a>
<div class="collapse" id="collapseLiteratur">
<p>auprès des auteurs</p>
</div>
</p>
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