© Barbara Krobath

Myélome multiple

RRMM: les données à long terme sur CARTITUDE-1 laissent entrevoir une guérison

Dans le myélome multiple nouvellement diagnostiqué (NDMM), les premières données issues du volet de détermination de la dose de l’étude MagnetisMM-6, combinant l’anticorps bispécifique elranatamab avec le lénalidomide et le daratumumab, se sont révélées convaincantes. L’étude ADVANCE a évalué l’ajout de daratumumab au régime KRd. Les résultats montrent une efficacité élevée, indépendamment de l’éligibilité des malades à la transplantation. De nombreuses données nouvelles concernent également le myélome multiple récidivant ou réfractaire (RRMM). Nous résumons ici les résultats à long terme de l’étude CARTITUDE-1, qui ouvrent la perspective d’une guérison de la maladie.

MM nouvellement diagnostiqué

Carfilzomib pour l’induction, laconsolidation et le maintien

Une étude italienne à trois bras a évalué l’efficacité du carfilzomib chez des patient·es nouvellement diagnostiqué·es avec un myélome multiple (MM), en association avec une autogreffe de cellules souches (ASCT).1

474 malades ont été randomisé·es pour recevoir une induction de 4 cycles de carfilzomib, lénalidomide et dexaméthasone (KRd), suivie d’une ASCT et de 4 cycles de KRd en consolidation (KRd-ASCT), ou une induction KRd suivie de 8 cycles de KRd (KRd12), ou encore 4 cycles de carfilzomib, cyclophosphamide et dexaméthasone (KCd) suivis d’une ASCT et de 4 cycles KCd (KCd-ASCT). Après la consolidation, une seconde randomisation a été effectuée dans deux bras de l’étude: traitement d’entretien par carfilzomib+lénalidomide (KR) ou lénalidomide seul. Ont été incluses les personnes de moins de 65 ans, éligibles à une ASCT. Les critères d’évaluation primaires de l’étude étaient la survie sans progression (PFS) après la première randomisation, la PFS sous le premier traitement ultérieur (PFS2) et la survie globale (OS).

Au final, les patient·es ont survécu 99 mois (KRd-ASCT) versus 70 mois (KRd12) versus 64 mois (KCd-ASCT) sans progression de la maladie à partir de la première randomisation. La PFS a été significativement plus longue sous traitement par KRd+ASCT par rapport au bras KRd12 (HR: 0,69; IC à 95%: 0,51–0,94; p=0,019) et au bras KCd-ASCT (HR: 0,63; IC à 95%: 0,46–0,85; p=0,003). Les patient·es à haut risque cytogénétique en ont particulièrement bénéficié. Le délai avant le prochain traitement (TTNT) après la première randomisation était en moyenne de 70 mois dans le bras KRd12 et de 86,5 mois dans le bras KCd-ASCT. Dans le bras KRd-ASCT, la médiane n’était pas atteinte après un suivi médian de 97,3 mois.

© Barbara Krobath

Impressions du congrès EHA 2025 à Milan

Après la deuxième randomisation, le traitement d’entretien par KR a montré une PFS significativement plus longue que R seul (HR: 0,70; IC à 95%: 0,50–0,98; p=0,040). Le traitement d’entretien par KR a été administré pendant 2 ans, suivi par du lénalidomide seul. Cela s’est reflété dans les courbes de Kaplan-Meier pour la PFS, divergentes jusqu’à la fin du traitement par carfilzomib puis rapprochant lentement. Le taux d’OS à 7 ans à partir de la deuxième randomisation était de 82% dans le bras KR et de 76% dans le bras R (HR: 1,03; IC à 95%: 0,61–1,75; p=0,907).

La PFS2 a également été influencée par le traitement de première ligne. 31% des patient·es du bras KRd-ASCT, 53% du bras KRd12 et 47% du bras KCd-ASCT ont reçu une autre ligne de traitement après le médicament à l’étude. Mesuré depuis la première randomisation, 67% (KRd-ASCT), 57% (KRd12) et 58% des malades (KCd-ASCT) étaient en rémission après 8 ans. Le risque de deuxième progression a été réduit de 35% (HR: 0,65; IC à 95%: 0,45–0,94; p=0,021) et de 32% (HR: 0,68; IC à 95%: 0,47–0,98; p=0,041) dans les comparaisons des bras KRd-ASCT versus KRd12. Concernant l’OS, les différences entre les bras de l’étude n’étaient pas statistiquement significatives à ce jour. Après 8 ans, 75% versus 73% versus 68% des malades étaient en vie.

Des tumeurs malignes secondaires ont été observées chez 6% des patient·es: 2% hématologiques, 4% solides, <1% cutanées. L’incidence était de 1,01 cas pour 100 personnes-années. Le risque de tumeurs malignes secondaires était plus élevé chez les patient·es ayant reçu une transplantation de cellules souches et chez les patient·es âgé·es.

Conclusion

Avec KRd plus ASCT, une PFS médiane de 99 mois a été atteinte. Après 8 ans, 75% des patient·es étaient encore en vie. Le maintien par carfilzomib (2 ans) plus lénalidomide (jusqu’à progression) a prolongé significativement la PFS. Le bénéfice du traitement d’entretien par carfilzomib a aussi été observé chez les patient·es MRD (maladie résiduelle minimale)-négatif·ves.

Efficacité prometteuse avec un anticorps bispécifique

L’elranatamab est un anticorps bispécifique ciblant BCMA-CD3, déjà approuvé en monothérapie pour le traitement des patient·es atteint·es de MM récidivant ou réfractaire après au moins trois lignes de traitement. L’étude MagnetisMM-6 vise à déterminer si l’association elranatamab+ lénalidomide+daratumumab (EDR) est supérieure au schéma DRd (daratumumab +lénalidomide+dexaméthasone) en première ligne chez des patient·es atteint·es de myélome inaptes à la transplantation.2

Dans la première partie de l’étude, les doses retenues pour la phaseIII étaient: elranatamab 76 mg SC q4w, daratumumab 1800 mg SC et lénalidomide 25 mg oral. 37 patient·es nouvellement diagnostiqué·es de myélome et inaptes à la transplantation, âge médian 75 ans, ont été inclus·es dans ce schéma posologique. 24% au stade R-ISS I, 54% au stadeII, et un quart étaient fragiles.

La plupart des effets indésirables associés au traitement étaient majoritairement hématologiques (83,8%; Grade 3–4: 78,4%), infectieux (70,3%; Grade 3–4: 18,9%) et SRC (62,2%; Grade 3–4: 0%). Après un suivi médian de 7,9 mois, 97,3% des patient·es ont répondu. 27,0% des patient·es ont obtenu au moins une rémission complète (≥CR) et 94,6% au moins une très bonne rémission partielle (≥VGPR). Le délai médian de réponse était de 1,5 mois (intervalle: 0,3–4,2).

Conclusion

Les premiers résultats de l’étude MagnetisMM-6 indiquent que l’elranatamab+daratumumab+lénalidomide (DER) est un traitement efficace et gérable chez les patients nouvellement diagnostiqués de myélome et inaptes à la transplantation. Le recrutement va bientôt débuter pour la phaseIII randomisée EDR versus DRd.

Daratumumab+KRd est un traitement de première ligne efficace

Les thérapies combinées modernes permettent d’obtenir des rémissions profondes et durables chez les patient·es nouvellement diagnostiqué·es de MM, indépendamment de leur éligibilité à une transplantation de cellules souches. L’étude ADVANCE, dont le critère d’évaluation principal était la MRD-négativité (10–5), a inclus des patient·es nouvellement diagnostiqué·es aptes ou inaptes à la transplantation, ou avec transplantation différée. Le schéma KRd avec ou sans daratumumab a été évalué.3 306 personnes nouvellement diagnostiquées de MM ont reçu 8 cycles de daratumumab+KRd (Dara-KRd) ou KRd seul. Après 4 cycles de thérapie, des cellules souches ont pu être récoltées chez des patient·es éligibles. La MRD-négativité a été évaluée après avoir complété le huitième cycle. Une transplantation de cellules souches était recommandée pour les patient·es MRD-positif·ves, reportée pour les MRD-négatif·ves. Les patient·es ont reçu du lénalidomide en traitement d’entretien.

Les malades inclus·es étaient âgé·es en moyenne de 61 ans et se trouvaient pour la plupart (61–63%) au stadeI du SSI. Un haut risque cytogénétique a été constaté pour 36,5% des patient·es dans le bras Dara-KRd et pour 30,9% dans le bras KRd. Au final, 59% des patient·es avec daratumumab contre 33% des patient·es sans daratumumab ont atteint la MRD-négativité (OR: 2,9; IC à 95%: 1,8–4,9; p<0,0001). Les personnes de <60 ans (66% contre 49%, p=0,006), de ≥60 ans (68% contre 42%; p=0,006), à haut risque (59% contre 41%; p=0,170) et à risque standard (71% contre 43%; p=0,004) ont bénéficié de l’administration de daratumumab. Après un suivi médian de 31,2 mois, la médiane de PFS n’était pas atteinte. 92% contre 83% des patient·es ont vécu sans progression (p=0,140). Le profil de sécurité était cohérent avec ceux connus des agents individuels. Dans le bras Dara-KRd, deux patient·es sont décédé·es d’une septicémie; dans le bras KRd, 1 patient·e d’une progression de la maladie. Dans l’ensemble, les effets indésirables associés au traitement étaient d’une fréquence comparable dans les deux bras de l’étude.

Conclusion

Dara-KRd devrait devenir un nouveau standard pour le traitement des patient·es nouvellement diagnostiqué·es de myélome multiple devant recevoir un schéma initial à base de KRd. Le traitement est utilisable indépendamment de l’éligibilité à la transplantation de cellules souches.

Le traitement par cellules CAR-T pourrait guérir des personnes atteintes de MM

Les CAR-T ont montré leur efficacité dans le traitement du MM récidivant ou réfractaire. Dans CARTITUDE-1, la médiane d’OS n’était pas atteinte lors de la dernière analyse, avec un suivi médian de 33,4 mois et une PFS médiane estimée de 34,9 mois.

Les résultats à 5 ans présentés lors du congrès de l’EHA confirment l’efficacité du ciltacabtagene autoleucel (Cilta-cel).4

Avec une dose de thérapie CAR-T-Cell, 33% des 97 patient·es traité·es vivaient sans progression ni traitement après ≥5 ans. 12 patient·es MRD-négatif·ves d’un centre participant restaient en rémission prolongée 5 ans après la perfusion de Cilta-cel. Les patient·es avec ou sans progression à 5 ans présentaient des caractéristiques comparables. Même en cas de haut risque cytogénétique ou de plasmocytomes extramédullaires, une PFS persistante a été observée avec la même probabilité que chez les autres patient·es. Un lien avec un contrôle prolongé de la maladie a été observé en cas de ratio cellules T/neutrophiles plus élevé, de cellules T naïves plus fonctionnelles (pré-perfusion), ainsi que d’un ratio effecteurs/cellules cibles (E/T) plus élevé, que ce soit avec les cellules T CAR+ totales, les cellules T CAR+ CD4+ ou un phénotype de mémoire centrale lors de l’expansion maximale (post-perfusion). La médiane d’OS a été atteinte après 60,7 mois.

Conclusion

Environ un tiers des patient·es atteint·es de MM récidivant ou réfractaire traité·es par Cilta-cel ont vécu sans progression pendant ≥5 ans. Les personnes MRD-négatives pourraient être considérées comme guéries ou potentiellement guéries.

Congrès hybride EHA2025 de l’Association européenne d’hématologie, 12–15 juin 2025, Milan, Italie

1 Gay F et al.: EHA 2025; Abstr. #S194 2 Dimopoulos MA et al.: EHA 2025; Abstr. #S206 3 Landgren CO et al.: EHA 2025; Abstr. #S207 4 Jagannath S et al.: EHA 2025; Abstr. #S192

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