
Points forts du congrès de l’ASH sur la LMA: les inhibiteurs de la ménine sont prometteurs
Auteur:
PD Dr méd. Boris Eugen Schleiffenbaum
Hämatologie
Klinik im Park, Zürich
AndreasKlinik Cham, Hirslanden
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Lors du dernier congrès annuel de l’American Society of Hematology (ASH), d’innombrables données d’études passionnantes et porteuses d’espoir sur la leucémie myéloïde aiguë (LMA) ont été présentées. Les participant·es ont été particulièrement impressionné·es par les inhibiteurs de la ménine, qui devraient à l’avenir améliorer considérablement le traitement des patient·es atteint·es de LMA.
Une étude rétrospective du Memorial Sloan Kettering Cancer Center a pu démontrer de manière assez convaincante que le traitement de consolidation chez les patient·es atteint·es de LMA dans le cadre d’une chimiothérapie intensive peut être administré en ambulatoire à un coût bien moindre qu’en milieu hospitalier (coût total de 13168 USD/cycle par rapport à 36658 USD/cycle, p<0,001).1
Et ce, sans qu’il faille s’attendre à davantage de complications (neutropénie fébrile, hémorragies importantes, séjours en soins intensifs, décès) ou à un pronostic plus défavorable (taux de survie sans événement [EFS] à deux ans: 67 par rapport à 69%; taux de survie globale [OS] à deux ans: 80 par rapport à 76%).
Une autre étude a pu montrer qu’un profil d’expression génique spécifique à une LMA avec maladie résiduelle (MRD) offre un pronostic au moins partiellement meilleur que selon la classification actuelle de l’«European Leukemia Network» (ELN) 2022/«International Consensus Classification» (ICC) 2022. Ces résultats pourraient ouvrir la voie à une classification de la LMA basée sur le génome et non plus sur le transcriptome.2
Des résultats surprenants pour le CPX-351
Il y a longtemps que la supériorité du CPX-351 sur le protocole «7+3» a été démontrée chez les patient·es âgé·es (60–75 ans) atteint·es de LMA à «Adverse risk» (mOS: 9,56 par rapport à 5,96 mois; HR: 0,69; p=0,003).3 Chez les patient·es plus jeunes (18–60 ans), aucun avantage n’a toutefois été constaté par rapport au traitement par FLAG-IDA (fludarabine, cytarabine, idarubicine et G-CSF; mOS: 13,3 par rapport à 11,4 mois; HR: 0,78; p=0,1). Une analyse de sous-groupe de l’étude AML19 a maintenant abouti à la conclusion surprenante que les patient·es jeunes atteint·es de syndrome myélodysplasique (SMD)/LMA (ICC 2022: ASXL-1, BCOR, EZH2, RUNX-1, SF3B1, SRSF2, STAG2, U2AF, ZRSR2) bénéficient bel et bien d’un traitement par CPX-351 (OS: 38,4 par rapport à 16,3 mois; HR: 0,38; p=0,008). Il est intéressant de noter ici que les patient·es sous FLAG-IDA présentaient initialement un taux de réponse nettement plus élevé (cycle 1: 33 par rapport à 45%; cycle 2: 69 par rapport à 62%), avec toutefois au final un taux de rémission complète (CR)/une négativité de la MRD (MDR-) similaire. Malgré des différences (encore) minimes dans la mortalité à 30 jours (3 par rapport à 7) et à 60 jours (7 par rapport à 10), une mortalité cumulée bien plus élevée a finalement été constatée sous FLAG-IDA (p=0,0021). La remontée du nombre de neutrophiles (>1,0G/L: 29,5 par rapport à 49,5 jours) et de thrombocytes (>100G/L: 29 par rapport à 49 jours) après le deuxième cycle de traitement, mais surtout l’incidence des effets secondaires sévères (10 par rapport à 76%) ont montré que c’est surtout la différence de toxicité qui pourrait être responsable de l’avantage en termes de survie sous CPX-351.4
En revanche, le groupe du Dana-Farber Cancer Institute a conclu dans son étude que l’avantage en termes de survie (mOS: 9,7 par rapport à 6,8 mois; p=0,037) sous CPX-351 par rapport au protocole «7+3», avec un taux de greffe à peu près similaire, résultait principalement de la survie plus longue des patient·es après une greffe (p=0,022).5
Pour ajouter à la confusion, le protocole «7+3» plus gemtuzumab à dose fractionnée était supérieur au traitement par CPX-351 chez les patient·es âgé·es (>60 ans) atteint·es de LMA à «Non adverse risk» (taux de CR/CRi [réponse complète avec récupération hématologique incomplète]: 85 par rapport à 78% après le deuxième cycle; taux de CR/MRD-; 84 par rapport à 66%; EFS à trois ans: 34 par rapport à 27%; OS à trois ans: 52 par rapport à 35%).6
Vénétoclax, entre autres, en cas de LMA nouvellement diagnostiquée
L’analyse rétrospective d’un groupe français semble suggérer que la dose complète de vénétoclax (Ven) pourrait être importante pour le pronostic des patient·es traité·es par Ven/azacitidine (Aza). L’étude souligne dans tous les cas l’importance pronostique de la MRD, même dans le traitement par Ven/Aza.7
Au-delà des applications actuelles, l’association Ven/Aza pourrait tout à fait constituer une bonne option pour les patient·es atteint·es de LMA CBF/avec mutation NPM1 présentant une récidive moléculaire, jusqu’à la greffe.8
Les données d’une étude chinoise sont intéressantes au regard des études portant sur Ven/Aza plus une chimiothérapie intensive (ICT) conventionnelle. Elles ont montré que Ven/Aza plus le protocole «7+3» permettait d’obtenir plus souvent une CR/CRi (91 par rapport à 42%, p=0,001) dans le traitement de patient·es plus jeunes – en particulier ceux·celles présentant un profil de risque «adverse» – par rapport au protocole «7+3» seul, mais avec une MRD- similaire (76 par rapport à 75%).9
Le groupe du MD Anderson Cancer Center a présenté des données très prometteuses d’une étude de phaseII sur le traitement des patient·es atteint·es de LMA nouvellement diagnostiquée. Le traitement consistait en une ICT à base de cladribine (5mg/m2, J1–5), d’idarubicine (8–10mg/m2, J1–3); d’AraC (1–1,5g/m2, J1–5) en traitement d’induction et à base de cladribine (5mg/m2, J1–3); d’idarubicine (8mg/m2, J1–2); de cytarabine (AraC, 0,75–1,5g/m2, J1–3) en traitement de consolidation, respectivement en combinaison avec le vénétoclax (400mg/j, J2–8). On a constaté une efficacité exceptionnellement élevée (CR/CRi: 94%, MRD-: 89%) avec un bon taux d’EFS à 5 ans (68%), de survie sans récidive (RFS) (74%) et d’OS (73%), qui pouvait être davantage amélioré par une greffe (OS avec greffe par rapport à sans greffe: 82 par rapport à 63%). Les effets secondaires correspondaient à peu près à ceux sous ICT sans ajout de vénétoclax.10
Point d’importance pratique: dans une autre étude, le groupe du MD Anderson Cancer Center a utilisé le pegfilgastrim (G-CSF) au jour 8 du traitement d’induction et de consolidation. Cela a accéléré la récupération en neutrophiles et a diminué l’incidence de la neutropénie fébrile ainsi que de la bactériémie, sans compromettre l’efficacité du traitement.11
De manière tout à fait similaire, une étude de phaseIB menée à New York a combiné le vénétoclax («ramp up» J1-2, 400mg PO, J3–8→J3–11→J3–14, «dose escalation») avec une ICT selon le protocole «7+3» (daunorubicine [60mg/m2, J2–4], AraC [100mg/m2, J2–8]) en traitement d’induction chez des patient·es plus jeunes atteint·es de LMA nouvellement diagnostiquée (18–75 ans; traitement de consolidation: AraC à 1,5g/m2, cycle 1, ou 1,0g/m2, cycle 2, respectivement J1, 3, 5 plus Venclyxto à 200mg/j PO, J1-7). Le traitement a été extrêmement bien toléré. Aucun effet secondaire n’a été observé, à l’exception tout au plus d’une entérocolite neutropénique, à laquelle on peut également s’attendre sous ICT selon le protocole «7+3» de la LMA, même sans vénétoclax (mortalité à 30 et à 60 jours: 0%; neutrophiles >0,5G/L J26, thrombocytes >50G/L J26). Ce traitement s’est également révélé extrêmement efficace (CR après induction: 82%, CR composite [CRc] MRD-: 86%). Sur une période d’observation de 9,6 mois, les critères mOS, mEFS et mDOR (durée de la réponse) n’ont pas été atteints. À la fin de la collecte des données, 93% des patient·es étaient en vie, dont 76% en rémission complète de la MRD. Les meilleurs résultats ont été obtenus chez les patient·es CBF/avec mutation NPM1(CR MRD-: 100%) ou présentant un «favorable» ou «intermediate risk» selon l’ELN 2022 (CR MRD-: 100%; OS: 100% à la fin de la collecte des données). Les patient·es porteur·ses d’une mutation TP53 n’en ont pas tiré profit.12
Avapritinib dans les LMA CBF/avec mutation KIT
Un groupe chinois a présenté des données intéressantes pour le traitement d’avenir des 25–35% de patient·es atteint·es de LMA CBF avec mutation KIT.13 42,9% des patient·es MRD+ traité·es par l’avapritinib, un inhibiteur de KIT (en monothérapie ou en combinaison avec une ICT ou Ven/HMA), sont devenus MRD-. Parmi les patient·es récidivants/réfractaires, 41,7% ont obtenu une CRc. Si les données EFS et OS confirment l’efficacité de ce traitement, il faudrait certainement étudier ce type de traitement dans des essais randomisés contrôlés de phaseIII, d’abord dans le contexte MRD+ plus r/r chez des patient·es atteint·es de LMA CBF avec mutation KIT, avant de pouvoir éventuellement inclure l’avapritinib dans le traitement de patient·es atteint·es de LMA nouvellement diagnostiquée.
Triple combinaison avec l’ivosidénib dans la LMA avec mutation IDH1
Une étude de phaseIb/II menée par l’équipe de Courtney DiNardo a donné d’excellents résultats pour la triple combinaison d’ivosidénib (500mg/j PO, à partir de C1J15), de Ven (400/800mg/j PO, J1–14) et d’Aza (75mg/m2, SC/IV, J1–7) chez les patient·es:
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à haut risque de SMD/néoplasie myéloproliférative (MPN; taux de réponse globale [ORR]: 100%, CRc: 100%, MRD-: 43%, taux d’OS à trois ans: 82%, taux de DOR à trois ans: 30%),
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atteint·es de LMA nouvellement diagnostiquée (ORR: 97%, CRc: 94%, MRD-: 77%, taux d’OS à trois ans: 71%, taux de DOR à trois ans: 72%) et
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atteint·es de LMA r/r (ORR: 83%, CRc: 83%, MRD-: 78%, taux d’OS à 3 ans: 52%, taux de DOR à 3 ans: 44%), résultats portant sur la population totale de l’étude.14
La comparaison de la triple combinaison (ivosidénib/Ven/Aza) avec la double combinaison (ivosidénib/Aza) a révélé des HR tout à fait prometteurs (OS: 0,41, EFS: 0,30, DOR: 0,19, p=0,01). Une étude prospective comparant la double et la triple combinaison a commencé le recrutement des patient·es au premier trimestre 2025, sous la direction de H. Döhner.
LMA avec mutation FLT3: co-mutations, giltéritinib, midostaurine
Le pronostic des patient·es atteint·es de LMA avec mutation FLT3 dépend entre autres aussi des co-mutations. Cela est connu depuis longtemps pour la co-mutation NPM1. Un groupe de Hanovre, en Allemagne, a rejoint le groupe «Harmony Alliance» (voir également le congrès 2022 de l’ASH, Dr méd. Alberto Sanchez)15 et a pu, à l’aide de ce jeu de données fortement élargi par la mise en réseau internationale, examiner les co-mutations des gènes liés au SMD chez les patient·es atteint·es de LMA avec mutation FLT3. Les patient·es étaient plus souvent de sexe masculin, plus âgé·es, présentaient un nombre plus faible de globules blancs (WBC) et moins souvent la mutation NPM1. Il·elles ont également présenté une moins bonne réponse au traitement (taux de CR: 74 par rapport à 82%) et un pronostic moins favorable (HR RFS: 1,14, HR OS: 1,36), ce qui s’est toutefois avéré être un facteur de risque non indépendant dans l’analyse de variance multivariée. En revanche, les co-mutations MR étaient tout à fait pertinentes pour le pronostic chez les patient·es atteint·es de LMA avec mutation NPM1 de type sauvage et FLT3. Il convient toutefois de noter que l’approche fondamentale de l’étude peut être remise en question, puisque les co-mutations liées aux SMD ont été étudiées en groupe et non individuellement.16
R. Stone a présenté les données à 10 ans de l’étude RATIFY lors du congrès de l’ASH. Dans cette étude, des patient·es atteint·es de LMA nouvellement diagnostiquée avec mutation FLT3 avaient reçu un traitement selon le protocole «7+3»+/-midostaurine (50mg BID PO, J8–21 en traitement d’induction et de consolidation, J1–28 en traitement d’entretien).17 Au cours de cette longue période d’observation, l’inhibiteur de FLT3 s’est également révélé efficace, même si la différence d’OS par rapport au placebo était moins bonne au fil du temps. Ceci est très probablement dû au vieillissement de la population de l’étude (67,7 par rapport à 25,6 mois). L’avantage d’une greffe lors de la première CR doit être souligné ici encore une fois (OS: non atteinte par rapport à respectivement 24,8 et 77,7 mois pour l’ensemble des patient·es ayant subi une greffe).
Dans une étude de phaseIb/II, le groupe australien dirigé par A. Wei a pu mettre en évidence que des patient·es atteint·es de LMA nouvellement diagnostiquée (>60 ans, non éligibles pour une ICT) pouvaient être traité·es avec succès par LDAC/Ven+/-midostaurine (50mg BID, J11–28), en comparaison avec l’AraC à faible dose (LDAC; 20mg/j SC, J1–10) et Ven (400→600mg/j PO, J1–28). Les taux de CR/CRi (63 et 57%, respectivement, par rapport à 82%) et la mOS (9,9 et 8,8 mois, respectivement, par rapport à 16,6 mois) ont été remarquables. Le taux de MRD- était de 0 par rapport à 61%. Une toxicité légèrement plus élevée a cependant été observée: le taux de neutropénie fébrile de grade3 était de 17,1 par rapport à 26,6%, et les effets secondaires gastro-intestinaux de grade1 et 2 étaient plus nombreux.18 Les patient·es porteur·ses d’autres mutations n’ont pas bénéficié de la midostaurine.
L’étude de phaseII PrECOG 0905 a comparé pour la première fois deux inhibiteurs de FLT3 dans le cadre d’un traitement d’induction (protocole «7+3») et d’un traitement de consolidation (AraC à haute dose) chez des patient·es atteint·es de LMA avec mutation FLT3 nouvellement diagnostiquée.19 Bien que les données relatives à l’EFS et à l’OS ne soient pas encore disponibles, la différence dans les taux de rémission obtenus était impressionnante: taux de CRc: 86,6 par rapport à 72,4%, p=0,042 (giltéritinib par rapport à midostaurine). Le taux de MRD à la fin du traitement d’induction a néanmoins semé le doute sur une efficacité potentiellement supérieure du giltéritinib (MRD-: 40 par rapport à 47,1%, p=0,366). Une analyse plus précise de la cinétique des MRD a toutefois pu montrer que 83,3% des patient·es sous giltéritinib avaient une MRD- à la fin du traitement de consolidation par rapport à 44,4% des patient·es sous midostaurine. Cela souligne une fois de plus la complexité de l’interprétation des données relatives à la MRD dans le traitement de la LMA.
L’émavusertib n’inhibe pas seulement FLT3, mais également la voie métabolique de la kinase 4 associée au récepteur de l’interleukine-1 (IRAK4) induite par les mutations du «splicing factor» (U2AF1 et SF3B1). Avec un profil d’effets secondaires acceptable, l’émavusertib en monothérapie a permis d’obtenir une CRc chez 16,1% des patient·es atteint·es de LMA r/r avec mutation du «splicing factor» ou FLT3.20 Une étude de suivi recrute actuellement des patient·es atteint·es de LMA en première CR MRD+ avec mutations FLT3 et du «splicing factor» pour une monothérapie par l’émavusertib.
LMA avec mutation NPM1/KMT2Ar:
les inhibiteurs de la ménine au centre de l’attention
Revuménib
I. Aldoss a présenté les données prometteuses de la phaseII en cours de l’étude AUGMENT-101. Les patient·es atteint·es de leucémie aiguë (leucémie lymphoïde aiguë, surtout chez les enfants; LMA r/r) avec réarrangement KMT2A (KMT2Ar) ont reçu le revuménib, un inhibiteur de la ménine (163mg BID PO, cycle de 28 jours; interactions avec le CYP3A4!). Les résultats ont montré des taux de CR/CRh (CR avec récupération hématologique partielle) de 22,7% (MRD-: 61,1%) et des taux de CRc de 43,3% (MRD-: 58,3%), ainsi qu’une mDOR de 6,4 mois dans la cohorte initiale (22 patient·es) et de 13,0 mois dans l’analyse intérimaire (13 patient·es).21 32,9% des patient·es ont pu recevoir une greffe. 42,9% ont ensuite commencé un traitement d’entretien par le revuménib. Les effets secondaires de ce traitement n’étaient pas négligeables (grade≥3: allongement de l’intervalle QTc chez 12%, syndrome de différenciation chez 13%). Voir également les données des congrès 202122 et 202223 de l’ASH ainsi que du congrès 202424 de l’EHA. À noter, le revuménib est autorisé par la FDA dans le traitement de la LMA r/r avec KMT2Ar depuis le 15 novembre 2024.
Bleximénib
De même, la phaseI de l’étude cAMeLot-1 a démontré l’efficacité d’un autre inhibiteur de la ménine, le bleximénib, dans le traitement de la leucémie aiguë avec KMT2Ar, mutation NPM1 et NUP98/214 (>90% LMA r/r), tout en révélant une bonne tolérance.25 Le taux de CR/CRh était de 33% (à une dose de 90/100mg BID PO); la mDOR était de 6 mois. La dose recommandée pour la phaseII (RP2D), 100mg BID PO, avec un «ramp-up» de 50mg BID pendant 2 semaines, a été choisie en raison du taux d’effets secondaires plus élevé (surtout cytopénies; aucun allongement de l’intervalle QTc; syndrome de différenciation de grade≥3 chez 6,5%, généralement vers C1J8) et du taux d’interruption à la dose plus élevée de 150mg BID, sans qu’une amélioration de l’efficacité clinique ou de l’inhibition de MEIS ne soient observée à cette dose élevée.
Enzoménib
Un autre inhibiteur de la ménine, l’enzoménib (DSP-5336), a été testé dans le cadre d’une étude de phaseI avec escalade de dose (40-300mg BID PO+/-traitement par azole) et d’optimisation (200/300mg BID PO) afin de déterminer la RP2D dans le traitement des patient·es atteint·es de LMA r/r avec KMT2Ar et mutation NPM1. Aucune toxicité dose-limitante (DLT) n’a été observée et seulement 1% des patient·es ont présenté un QTc. Il n’y a eu aucun abandon de l’étude en raison d’effets secondaires et surtout aucun syndrome de différenciation cliniquement significatif (10,7% au total, sans prophylaxie, sans «ramp up»).26 Les azoles n’ont guère eu d’influence sur la pharmacocinétique. Le traitement s’est avéré efficace (KMT2Ar: 300mg BID, taux de CR+CRh: 40%, NPM1: 200/300mg BID, 47,1%). Contrairement à ceux·celles qui n’ont pas répondu, les patient·es qui ont répondu au traitement ont montré une diminution cohérente de l’activité HOXA9/MEIS1 et une augmentation de la CD11b dans les échantillons de moelle osseuse après chaque cycle. Ces analyses de laboratoire pourraient donc servir de biomarqueurs pour le succès d’un traitement par un inhibiteur de la ménine (voir également le congrès 2024 de l’EHA).27
Ven/HMA+revuménib
Le traitement combiné par Ven/HMA est la référence dans le traitement des patient·es atteint·es de LMA qui ne tolèrent pas une ICT. Les études précliniques ont également montré une synergie entre Ven et les inhibiteurs de la ménine, de sorte que la prochaine étape dans le traitement des patient·es atteint·es de LMA r/r avec mutation NPM1/NUP98 ou KMT2Ar consistait en un traitement purement par voie orale à base de Ven (400mg/j après «ramp up», J1–14), de décitabine et de cédazuridine (35 et 100mg, J1–5) en combinaison avec le revuménib (113mg→163mg, BID, PO, avec un inhibiteur puissant du CYP3A4, J1–28; cycle de 28 jours), comme dans l’étude de phaseI/II du MD Anderson Cancer Center.
Une thrombopénie prolongée (42 jours) est survenue comme DLT à la fois à la dose de 113mg de revuménib (1/6 des participant·es) et à la dose de 163mg (1/6 également), 163mg ayant alors été choisi comme RP2D.28 De plus, un allongement de l’intervalle QTc (grade3) a été observé chez 9% des patient·es et un syndrome de différenciation (grade3) chez 3%. Les autres effets secondaires correspondaient à ceux que l’on trouve habituellement chez les patient·es atteint·es de LMA r/r traité·es par Ven/HMA (neutropénie fébrile, pneumonie, septicémie). Au total, deux décès sont survenus à la suite du traitement (insuffisance respiratoire, bactériémie). L’efficacité a toutefois nettement dépassé celle de la monothérapie par le revuménib connue jusqu’à présent: taux de CR/CRh: 48%, taux de CR: 39%, MRD-: 88%; CRD (durée de rémission complète, 6 mois) 74%, mDOR non atteinte; taux d’OS (6 mois): 68%, mOS non atteinte.
Ziftoménib
Sur la base de ces données prometteuses chez les patient·es atteint·es de LMA r/r (voir ci-dessus et voir aussi Lancet Oncology 2024,29 taux de CR/CRh: 35%), les résultats de l’étude de phaseIa KOMET-007 étaient très attendus. Cette dernière a combiné avec un succès retentissant l’inhibiteur de la ménine ziftoménib (J8 du traitement d’induction, de consolidation et d’entretien post-greffe) avec un traitement selon le protocole «7+3» chez des patient·es atteint·es de LMA nouvellement diagnostiquée et présentant un profil de risque défavorable (>60 ans, LMA-t, cytogénétique «Adverse risk»). Les données sur le ziftoménib 200 – 400 – 600mg:30
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CRc/CRh avec mutation NPM1: 100/100% – 100/67% – 100/57%; MRD-: 76%;
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CRc/CRh avec KMT2Ar: 90/63% – 67/83% – 100/100%; MRD-: 75%
Après une période de suivi de 31 et 19 semaines (NPM1 et KMT2Ar, respectivement), 100 et 96% des patient·es étaient encore en vie. Les effets secondaires observés correspondaient aux effets secondaires connus d’une ICT chez les patient·es atteint·es de LMA nouvellement diagnostiquée: cytopénie, nausées, diarrhée et constipation. Aucune DLT n’est survenue et aucun traitement n’a été arrêté en raison d’une récidive ou d’effets secondaires. Aucune interaction avec les azoles n’est connue pour ce médicament, aucun allongement de l’intervalle QTc n’a été rapporté. Un seul patient a présenté un syndrome de différenciation, mais celui-ci était suffisamment léger pour que le traitement ne soit pas interrompu. Le délai jusqu’à la remontée du nombre de neutrophiles (>0,5G/L, 200/400/600mg: 32/27/26 jours) et de thrombocytes (>50G/L, 28/28/26 jours) a également été impressionnant. Sur la base de ces données, deux études de phaseIII sont d’ores et déjà prévues en parallèle, pour lesquelles le recrutement débutera en 2025: l’une portant sur le ziftoménib combiné avec une ICT selon le protocole «7+3» chez des patient·es jeunes et en bonne forme présentant une LMA avec mutation NPM1/avec KMT2Ar nouvellement diagnostiquée, l’autre sur l’association Ven/Aza chez des patient·es plus âgé·es.
À noter, ce nouveau type de traitement rend toutefois difficile la différenciation entre la moelle osseuse régénérative et celle réfractaire; la recherche de NPM1 par immunohistologie aide dans ce cas.
Bleximénib plus ICT
De manière tout à fait similaire, un groupe de Toulouse a combiné l’inhibiteur de la ménine bleximénib (J4, 30mg/50mg/100mg en traitement d’induction, de consolidation et pendant 12 mois en traitement d’entretien; au moment d’une éventuelle greffe, les patient·es ont été censuré·es) avec le protocole «7+3» dans une étude de phaseIb chez des patient·es atteint·es de LMA avec mutation NPM1/avec KMT2Ar nouvellement diagnostiquée. Elle a obtenu un succès similaire (Tab. 1): bleximénib 50/100mg BID PO, CRc population totale: 86%, CR/CRh: 81% (KMT2Ar: 88%; NPM1: 77%), CR: 76%; MRD- sous bleximénib 50mg: 2/3; MRD- sous bleximénib 100mg: 6/6).31 Une fois de plus, les effets secondaires correspondaient à ceux observés sous ICT, mais cette fois avec une remontée légèrement retardée du nombre de neutrophiles (>0,5G/L, 32 jours) et de thrombocytes (>50G/L, 33 jours). Là encore, aucun·e patient·e n’a présenté d’allongement de l’intervalle QTc, et aucun syndrome de différenciation ni aucune DLT n’a été observé.
Tab. 1: Bleximénib combiné avec une ICT en cas de LMA nouvellement diagnostiquée: efficacité préliminaire dans la population «Intention to treat» (modifié selon Recher C et al.)31
ICT par rapport à Ven/Aza
Indépendamment de l’utilisation d’inhibiteurs de la ménine, la décision thérapeutique peut être difficile à prendre chez les patient·es en bonne forme atteint·es de LMA avec mutation NPM1 nouvellement diagnostiquée, qui présentent un bon profil de risque et qui sont un peu plus âgé·es: une ICT promet plutôt la guérison, mais elle est plus toxique. Le traitement par Ven/Aza est certes moins toxique, mais le·la patient·e risque davantage de subir une récidive s’il n’est pas suivi d’une greffe de cellules souches. Dans une étude rétrospective menée dans un seul centre de l’hôpital John-Hopkins, il a été possible de montrer que l’efficacité de l’ICT et de l’association Ven/Aza est certes similaire (CR: 81 par rapport à 74%; OS: 6,2 par rapport à 4,9 ans, avec une CIR et une NRM similaires), mais que les patient·es ayant subi une greffe en ont tiré profit indépendamment du traitement préalable.32 Cela donne à cette étude un caractère directement provocateur, notamment au regard du traitement émergent des patient·es porteur·ses de mutation NPM1 par des inhibiteurs de la ménine.
ICT
Une analyse rétrospective des données des études anglaises AML17 et AML19 a montré non seulement une amélioration du taux de MRD- (76 par rapport à 59%) après 2 cycles de traitement d’induction chez les patient·es atteint·es de LMA avec KMT2Ar nouvellement diagnostiquée, mais aussi une amélioration du pronostic (RFS «intermediate», HR: 0,80; RFS «adverse», HR: 0,45; OS «intermediate», HR: 0,72; OS «adverse», HR: 0,63) grâce à l’intensification de la chimiothérapie (FLAG-IDA par rapport à DA, ADE, CPX351).33 Une MRD- avait une grande importance pronostique (HR OS: 5,11; HR CIR: 6,43), de sorte que les groupes de risque initiaux selon l’ELN 2022 n’avaient plus d’importance pronostique chez les patient·es MRD-. Ces données pourraient s’avérer essentielles dans le choix de la base de la chimiothérapie combinée avec des inhibiteurs de la ménine dans le traitement des patient·es avec KMT2Ar.
Immunothérapie: AFM28
L’AFM28 (CD16 pour les cellules NK, CD123 pour les cellules de LMA), un «engager» de cellules NK tétravalent bispécifique, entraîne la lyse des cellules de LMA indépendante de CD64 (cytotoxicité à médiation cellulaire dépendante des anticorps, ADCC). La monothérapie par AFM28 de patient·es atteint·es de LMA r/r dans le cadre d’une étude de phaseI avec escalade de dose (25–300mg/sem IV) a été efficace aux doses de 250/300mg/sem IV (taux de CRc: 40%) et a eu peu d’effets secondaires («Infusion related reaction» [IRR] de grades1+2: 13/29; syndrome de libération de cytokines [CRS]: 2/29; aucune neurotoxicité).34 Les données pharmacocinétiques ainsi que le degré de saturation des récepteurs correspondaient à l’efficacité du traitement à la dose de 250/300mg d’AFM28 par semaine.
Perspectives
L’«assay for transposase-accessible chromatin with sequencing» (ATAC-Seq) permet le profilage épigénétique en définissant et en identifiant les régions de chromatine accessibles aux interactions ARN. Cela permet de différencier davantage la LMA en complément du test génétique par séquençage de nouvelle génération (NGS) et ouvre des possibilités pour de nouvelles approches thérapeutiques, au-delà des améliorations de la classification et du pronostic.35
Les blastes de la LMA avec une faible expression de «reactive oxygen species» (ROS) identifient un groupe toujours hétérogène de cellules souches leucémiques (CSL) possédant les caractéristiques typiques des CSL: elles sont en dormance et ne se divisent que rarement, mais ont la propriété de s’auto-renouveler et d’avoir un «engraftment» rapide. Elles présentent en outre une forte adhésion dans une localisation spécifique dans la niche endostéale et un profil d’expression spécifique, et elles se présentent de manière spécifique dans le séquençage d’ARN de cellule unique des cellules souches hématopoïétiques (CSH) selon la méthode «Uniform manifold approximation and projection» (UMAP). À l’avenir, les nouveaux médicaments devraient se concentrer sur cette population de CSL de la LMA ainsi définie afin de pouvoir réellement guérir les patient·es atteint·es de LMA.36
Dans ce contexte, il est important que les mutations qui constituent la base d’une récidive ultérieure apparaissent très tôt dans les CSL.37 Si l’on peut définir les CSL avec certitude, il devrait être possible de cibler très tôt les nouvelles mutations au moyen d’un traitement élargi.
Littérature:
1 Boussi L et al.: ASH 2024; Abstr. #445 2 Oelschläger L et al.: ASH 2024; Abstr.#641 3 Lancet JE et al.: J Clin Oncol 2018; 36: 2684-92 4 Mehta P et al.: ASH 2024; Abstr. #55 5 Shimony S et al.: ASH 2024; Abstr. #60 6 Knapper S et al.: ASH 2024; Abstr. #59 7 Heiblig M et al.: ASH 2024; Abstr. #846 8 Higué J et al.: ASH 2024; Abstr. #58 9 Lu J et al.: ASH 2024; Abstr. #971 10 Bouligny M et al.: ASH 2024; Abstr. #734 11 Kadia TM et al.: ASH 2024; Abstr. #446 12 Mantzaris I et al.: ASH 2024; Abstr. #57 13 Dou X et al.: ASH 2024; Abstr. #222 14 Marvin-Peek J et al.: ASH 2024; Abstr. #219 15 Sanchez A et al.: ASH 2022; Abstr. #304 16 Mecklenbrauck R et al.: ASH 2024; Abstr. #844 17 Stone R et al.: ASH 2024; Abstr. #218 18 Chua CC et al.: ASH 2024; Abstr. #217 19 Luger S et al.: ASH 2024; Abstr. #221 20 Winer ES et al.: ASH 2024; Abstr. #737 21 Aldoss I et al.: ASH 2024; Abstr. #211 22 Stein E et al.: ASH 2021; Abstr. #699 23 Issa G et al.: ASH 2022; Abstr. #63 24 Aldoss I et al.: EHA 2024; Abstr. #S131 25 Searle E et al.: ASH 2024; Abstr. #212 26 Zeidner JF et al.: ASH 2024; Abstr. #213 27 Daver N et al.: EHA 2024; Abstr. #132 28 Issa G et al.: ASH 2024; Abstr. #216 29 Wang ES et al.: Lancet Oncol 2024; 25:1310-24 30 Zeidan AM et al.: ASH 2024; Abstr. #214 31 Recher C et al.: ASH 2024; Abstr. #215 32 Zale A et al.: ASH 2024; Abstr. #450 33 Othman J et al.: ASH 2024; Abstr. #845 34 Montesinos P et al.: ASH 2024; Abstr. #738 35 Ochi Y et al.: ASH 2024; Abstr. #639 36 Benetton M et al.: ASH 2024; Abstr. #640 37 Turkalj J et al.: ASH 2024; Abstr. #642
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