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L’allergie en orthopédie et traumatologie

<p class="article-intro">La notion d’allergie au métaux, sujet émergeant dans la littérature orthopédique, est une réaction d’hypersensibilité de type IV. Le nickel est le métal le plus allergène, suivi par le cobalt et le chrome. Il n’existe actuellement pas de ligne de conduite universelle, ni diagnostique ni thérapeutique.</p> <p class="article-content"><div id="keypoints"> <h2>Keypoints</h2> <ul> <li>L&rsquo;hypersensibilit&eacute; aux m&eacute;taux existe.</li> <li>Aucun test de d&eacute;pistage n&rsquo;est recommand&eacute;.</li> <li>Apr&egrave;s exclusion des autres causes d&rsquo;&eacute;chec et en cas d&rsquo;anamn&egrave;se positive &agrave; une allergie cutan&eacute;e aux bijoux fantaisie et boutons de jeans, les patch-tests peuvent permettre d&rsquo;appuyer le diagnostic.</li> <li>Les biopsies perop&eacute;ratoires avec analyses histologiques sont l&rsquo;examen de choix pour confirmer le diagnostic d&rsquo;hypersensibilit&eacute;.</li> </ul> </div> <h2>Introduction</h2> <p>La notion d&rsquo;allergie aux m&eacute;taux, une hypersensibilit&eacute; de type IV retard&eacute;e, est actuellement un sujet &eacute;mergent dans la litt&eacute;rature orthop&eacute;dique, apr&egrave;s avoir &eacute;t&eacute; fr&eacute;quemment rapport&eacute;e dans d&rsquo;autres domaines.<sup>1, 2</sup> Elle se pr&eacute;sente par diff&eacute;rents sympt&ocirc;mes: douleur, &eacute;panchement articulaire, cicatrisation retard&eacute;e avec parfois un &eacute;coulement prolong&eacute; et une d&eacute;faillance de l&rsquo;implant. Elle est m&eacute;di&eacute;e par les cellules de Langerhans ainsi que les cellules T et n&rsquo;apparait g&eacute;n&eacute;ralement qu&rsquo;apr&egrave;s 12 &agrave; 72 heures. Le diagnostic d&rsquo;hypersensibilit&eacute; est toutefois difficile &agrave; confirmer, et, m&ecirc;me s&rsquo;il l&rsquo;est, il n&rsquo;est pas certain qu&rsquo;elle soit cause de complication. C&rsquo;est donc un diagnostic d&rsquo;exclusion.<br /> Environ 10&ndash;15 % de la population pr&eacute;sentent une hypersensibilit&eacute; cutan&eacute;e aux m&eacute;taux, le plus souvent au nickel (14 %), suivi du cobalt et du chrome (1&ndash;2 %).<sup>3, 4</sup> Le titane, utilis&eacute; fr&eacute;quemment dans certains implants proth&eacute;tiques est consid&eacute;r&eacute; comme inerte, m&ecirc;me si de rares cas d&rsquo;hypersensibilit&eacute; ont toutefois &eacute;t&eacute; rapport&eacute;s.<sup>5</sup> Les facteurs de pr&eacute;dictifs av&eacute;r&eacute;s sont le sexe f&eacute;minin (risque 4 x plus grand li&eacute; &agrave; l&rsquo;exposition aux bijoux fantaisies), et l&rsquo;atopie, notamment avec un ecz&eacute;ma.<sup>3</sup></p> <h2>Mat&eacute;riel orthop&eacute;dique</h2> <p>Le mat&eacute;riel d&rsquo;ost&eacute;osynth&egrave;se, tels que les plaques, les broches de Kirschner ou les cerclages sont en &laquo;stainless steel&raquo; ou acier inoxydable. Il est compos&eacute; d&rsquo;un m&eacute;lange de fer, de chrome et de nickel, et peut donc &ecirc;tre une cause de r&eacute;actions d&rsquo;hypersensibilit&eacute;. Le mat&eacute;riel des implants proth&eacute;tiques est quant &agrave; lui majoritairement compos&eacute;s de chrome et de cobalt ou de titane. &Agrave; noter que les implants appel&eacute;s hypoallerg&eacute;niques, bien souvent en titane, Oxinium &trade; ou c&eacute;ramique, sont plus co&ucirc;teux. Les agrafes, fr&eacute;quemment utilis&eacute;es pour la fermeture de la peau sont compos&eacute;es de fer, nickel avec du chrome et des r&eacute;actions cutan&eacute;es ont &eacute;t&eacute; d&eacute;crites.<sup>2</sup></p> <h2>Quel implant choisir?</h2> <p>Le choix de l&rsquo;implant n&rsquo;est pas standardis&eacute;. Il commence par l&rsquo;interrogation du patient, notamment en ce qui concerne des r&eacute;actions &eacute;ventuelles aux boutons de jeans ou au port de bijoux fantaisie.<sup>6</sup> <br />Diff&eacute;rents tests existent, notamment les patch-tests ou tests &eacute;picutan&eacute;s, consid&eacute;r&eacute;s comme le gold standard en dermatologie pour la mise en &eacute;vidence des dermatites de contact. Cependant, ils ne contiennent habituellement que le nickel, le cobalt et le chrome, allerg&egrave;nes les plus fr&eacute;quents. De plus, les m&eacute;canismes test&eacute;s par ces patchtests sont propres &agrave; l&rsquo;environnement &eacute;picutan&eacute; et ne sont pas prouv&eacute;s dans les couches profondes. Il n&rsquo;est donc pas encore actuellement d&eacute;montr&eacute; que le patch-test soit le meilleur test de d&eacute;pistage pour les patients susceptibles d&rsquo;hypersensibilit&eacute; en orthop&eacute;die.<sup>7, 8</sup> <br />Un autre test, in vitro, existe. Il s&rsquo;agit du test de transformation lymphocytaire (LTT), qui quantifie la prolif&eacute;ration des lymphocytes apr&egrave;s activation par des allerg&egrave;nes pratiqu&eacute;s in vitro avec le sang du patient. Ce test est exigeant techniquement, puisqu&rsquo;il requiert un &eacute;chantillon de sang frais du patient. Il reste peu disponible et ne teste qu&rsquo;un nombre limit&eacute; d&rsquo;allerg&egrave;nes.<sup>9</sup> Sa sp&eacute;cificit&eacute; restant faible<sup>9</sup>, il est r&eacute;serv&eacute; aux patients pr&eacute;sentant une proth&egrave;se suspecte et des r&eacute;sultats ambivalents aux patch-tests cutan&eacute;s.</p> <p>En r&eacute;sum&eacute;, malgr&eacute; l&rsquo;existence de ces tests, il n&rsquo;existe pas d&rsquo;association clairement d&eacute;finie entre hypersensibilit&eacute;, patchtest positif et r&eacute;action d&rsquo;hypersensibilit&eacute; p&eacute;ri-proth&eacute;tique (situ&eacute; dans les couches profondes). Le choix d&rsquo;un implant orthop&eacute;dique hypoallerg&eacute;nique ne devrait pas se d&eacute;cider sans consilium allergologique au pr&eacute;alable.<sup>10</sup><br />En traumatologie, &eacute;tant donn&eacute; que les ost&eacute;osynth&egrave;ses sont g&eacute;n&eacute;ralement plus proches de la barri&egrave;re cutan&eacute;e, un mat&eacute;riel d&rsquo;ost&eacute;osynth&egrave;se en titane sera privil&eacute;gi&eacute; par rapport au mat&eacute;riel en &laquo;stainless steel&raquo; ou acier inoxydable si le patient d&eacute;crit une allergie cutan&eacute;e aux bijoux fantaisie ou boutons de jeans.</p> <h2>Suspicion d&rsquo;hypersensibilit&eacute; chez un patient d&eacute;j&agrave; op&eacute;r&eacute;</h2> <p>Si le patient rapporte une &eacute;volution d&eacute;favorable (douleurs, rougeur, &eacute;panchement, retard de cicatrisation), il faut avant tout &eacute;liminer une complication infectieuse ou m&eacute;canique. Le diagnostic d&rsquo;hypersensibilit&eacute; reste un diagnostic d&rsquo;exclusion. Les radiographies permettent d&rsquo;exclure les fractures ou vices d&rsquo;implantation m&eacute;caniques, tandis que les examens sanguins ou ponctions de l&rsquo;articulation proth&eacute;s&eacute;e ou de collections autour d&rsquo;un mat&eacute;riel, permettent d&rsquo;exclure les causes infectieuses. Les pr&eacute;l&egrave;vements histologiques r&eacute;alis&eacute;es lors d&rsquo;une r&eacute;vision de proth&egrave;se sont quant &agrave; eux le gold standard pour confirmer le diagnostic d&rsquo;hypersensibilit&eacute;.</p> <h2>Conclusion</h2> <p>L&rsquo;hypersensibilit&eacute; aux m&eacute;taux est actuellement de plus en plus &eacute;tudi&eacute;e. Compte tenu du fait que la symptomatologie n&rsquo;est pas sp&eacute;cifique, elle reste un diagnostic d&rsquo;exclusion. Il n&rsquo;y a par ailleurs aucun consensus clair quant &agrave; la prise en charge. Les patch-tests de d&eacute;pistage ne sont pas recommand&eacute;s mais des patch-tests &eacute;picutan&eacute;s peuvent aider &agrave; asseoir une suspicion clinique apr&egrave;s exclusion des autres causes de d&eacute;faillance d&rsquo;implant et apr&egrave;s anamn&egrave;se fournie du patient.<br /><br /></p> <p><img src="/custom/img/files/files_datafiles_data_Zeitungen_2019_Leading Opinions_Ortho_1903_Weblinks_lo_ortho_1903_s26_fig1.jpg" alt="" width="1419" height="1743" /></p></p> <p class="article-footer"> <a class="literatur" data-toggle="collapse" href="#collapseLiteratur" aria-expanded="false" aria-controls="collapseLiteratur" >Literatur</a> <div class="collapse" id="collapseLiteratur"> <p><strong>1</strong> Hallab N et al.: Metal sensitivity in patients with orthopaedic implants: J Bone Joint Surg Am 2001; 83(3): 428‑36 <strong>2</strong> Thomas P: Clinical and diagnostic challenges of metal implant allergy using the example of orthopaedic surgical implants. Allergo J Int 2014; 23(6): 179‑85 <strong>3</strong> Roberts TT et al.: Allergic or hypersensitivity reactions to orthopaedic implants: J Am Acad Orthop Surg 2017; 25(10): 693‑702 <strong>4</strong> Sch&auml;fer T et al.: Epidemiology of contact allergy in adults. Allergy 2001; 56(12): 1192‑6 <strong>5</strong> Wood MM, Warshaw EM: Hypersensitivity reactions to titanium: diagnosis and management. Dermatitis 2015; 26(1): 7‑25 <strong>6</strong> Graves CM et al.: Patient reported allergies are a risk factor for poor outcomes in total hip and knee arthroplasty. J Arthroplasty 2014; 29(9 Suppl): 147‑9 <strong>7</strong> Schalock PC et al.: Hypersensitivity reactions to metallic implants - diagnostic algorithm and suggested patch test series for clinical use. Contact Dermatitis 2012; 66(1): 4‑19 <strong>8</strong> Pinson ML et al.: Metal hypersensitivity in total joint arthroplasty. Ann Allergy Asthma Immunol 2014; 113(2): 131‑6 <strong>9</strong> Hallab NJ et al.: Th1 type lymphocyte reactivity to metals in patients with total hip arthroplasty. J Orthop Surg 2008 ;3: 6 <strong>10</strong> Thomas P et al.: Patients with intolerance reactions to total knee replacement: combined assessment of allergy diagnostics, periprosthetic histology, and peri-implant cytokine expression pattern. Biomed Res Int 2015; 2015: 910156 <strong>11</strong> Wernly D et al.: Hypersensitivity to metal: myth or reality? Rev Med Suisse 2018; 14(631): 2243‑7</p> </div> </p>
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